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Enfouir le CO2 : quels espoirs ?

Avec l’entrée en vigueur de l’Accord de Paris vendredi dernier, il devient impératif que tous les pays se mettent en mode solution. Il faudra réduire, si cela est possible, les émissions de gaz à effet de serre de manière telle qu’on puisse maintenir le réchauffement au dessous de 2 degrés C d’ici la fin du siècle. La tâche est énorme, dans un contexte où la population continuera de croître, tout comme la consommation individuelle de biens et d’énergie. Il est clair que dans les pays industrialisés il faudra changer certaines habitudes de vie, appliquer des mesures d’efficacité énergétique et augmenter là où c’est possible, la proportion d’énergie de source renouvelable. Mais il demeure que tout cela ne fera pas le poids. En effet, la proportion de carburants fossiles dans la fourniture d’énergie primaire qui est de 80% à l’heure actuelle à l’échelle mondiale sera au mieux encore de 60% en 2040. Comme la croissance prévue de la demande énergétique augmentera de 60 à 70%, les émissions liées à la combustion seront encore plus élevées en 2040 qu’aujourd’hui. Il faudra de toute évidence trouver d’autres solutions et les déployer rapidement. Le captage et le stockage du CO2 (CSC) s’inscrit dans cette optique.

L’idée est simple. À partir d’une source ponctuelle de CO2, par exemple une centrale thermique au charbon ou au gaz qui  produit de l’électricité, on capte de CO2 de la cheminée pour le pomper sous pression dans une formation géologique où il sera emprisonné. En termes de changements climatiques, on peut penser que l’électricité produite par cette centrale serait dorénavant neutre en émissions. Tout cela est bien séduisant pour des ingénieurs et équipementiers. En effet, les technologies existent, il ne reste qu’à concevoir le projet et à trouver le financement pour le construire et l’opérer. C’est là où le bât blesse… En effet, chaque projet est particulier et exige qu’on l’adapte au flux gazeux, au procédé industriel, à la compétition sur les marchés. Il faut aussi disposer  d’une formation géologique appropriée pour recevoir et conserver de manière durable et sécuritaire les millions de tonnes de gaz qui y seront injectées. Tout cela a un coût et ce n’est pas donné. Malgré la beauté du concept, il y a donc très peu d’usines de CSC qui se sont implantées dans le monde.

Lorsqu’il est devenu évident que cette technologie devait être déployée à large échelle, les industriels ont demandé l’aide gouvernementale pour établir des projets pilotes. En conséquence, il n’y a qu’une vingtaine d’usines de CSC qui enfouissent entre 20 et 30 millions de tonnes de CO2 par année. Cette capacité devrait monter à 40 millions de tonnes en 2020. Pour donner un ordre de grandeur, la fermeture d’une vieille centrale au charbon à Hazelwood en Australie réduira les émissions de ce pays de 16 millions de tonnes par année. Selon le Global Carbon Capture and Storage Institute il faudrait installer des usines de CSC capables de retirer 4 milliards de tonnes de CO2 à chaque année d’ici 2040, c’est à dire 100 fois plus que ce qui sera réellement en place en 2020 !

Pour arriver à la cible de l’Accord de Paris, il faudrait que le CSC traite 6 milliards de tonnes de CO2 par année en 2050 et encore plus par la suite car il faudra éventuellement non seulement éliminer les émissions, mais aussi séquestrer du CO2 généré à partir de la biomasse, pour réaliser ce qu’on appelle dans notre jargon des « émissions négatives ».

Le CSC est une approche « bout du tuyau ». Elle ne change rien au paradigme dominant. Elle ne peut donc pas être une solution unique, ni même déterminante pour atteindre la cible de l’Accord de Paris. Toutefois, dans la panoplie des outils qui s’offrent à notre société, sa mise en œuvre est nécessaire, mais en aucune façon suffisante. Finalement, le CSC ne sera jamais adopté à large échelle sans un prix très élevé du carbone.

Claude Villeneuve
Professeur titulaire
Directeur de la Chaire en éco-conseil
Département des sciences fondamentales
Université du Québec à Chicoutimi
claude_villeneuve@uqac.ca

Un grand scientifique nous a quittés

Mardi dernier s’est éteint  le Dr. Fred Roots, un scientifique canadien mondialement connu. Âgé de 93 ans, il était l’une des personnes les plus fascinantes que j’aie côtoyées. Né à Banff et orphelin de père très jeune, il a complété ses études comme  ingénieur géologue à l’Université de Colombie Britannique et obtenu son doctorat en géologie de la prestigieuse université Princeton aux Etats-Unis. En 1949, il a rejoint la Scott Polar Research Institute de Grande-Bretagne comme géologue en chef d’une expédition internationale de trois ans en Antarctique. C’est à cette occasion qu’on a trouvé les premières preuves des changements climatiques. Sa carrière a été extraordinaire. Il est considéré comme un des grands explorateurs du vingtième siècle, ayant participé à des dizaines d’expéditions scientifiques dans l’Arctique, l’Antarctique, l’Himalaya et les Rocheuses en tant que géologue principal. Il détient également le record du plus long voyage autonome (189 jours) en traîneau à chiens.

Il a aidé à rédiger le Traité sur l’Antarctique, qui préserve le continent entier comme territoire apatride dédié à la recherche scientifique. Une chaine de montagnes a d’ailleurs été nommée en son honneur “Antarctica Roots Range” et en mars dernier, il a reçu la plus prestigieuse récompense pour un explorateur : la Explorer Medal du Explorer’s Club (https://explorers.org/news/news_detail/the_2016_explorers_club_annual_awardees) au palmarès de laquelle il figure avec des légendes comme Robert Peary (1914), Roald Amundsen (1927), Edmund Hillary (1986), Jane Goodall (1993).  En 1968, il a participé à la création du Programme sur l’Homme et la biosphère (MAB) de l’UNESCO. Il a également été le fondateur du Comité MAB canadien. Tout cela peut apparaitre bien loin de nous. Pourtant Fred Roots a considérablement influencé mon histoire personnelle et contribué à laisser des traces durables au Québec.

J’ai rencontré Fred à Hamilton en Ontario en 1984, à l’occasion d’une conférence du MAB Canada qu’il présidait. À l’époque, comme aujourd’hui, je me passionnais pour l’éducation relative à l’environnement et cette conférence avait été l’occasion de créer un réseau MAB Canada pour l’éducation relative à l’environnement, le MAB-Net, auquel j’ai participé avant de siéger au Programme canadien des changements à l’échelle du globe, puis à la Commission des sciences de la Commission canadienne pour l’UNESCO que j’ai  présidé de 2000 à 2004. Fred Roots a écrit la préface de la première édition de « Vivre les changements climatiques » parue en 2001. Il a aussi soutenu la création du programme de DÉSS en Éco-conseil que nous avons démarré à l’UQAC la même année, puis la création de la Chaire en éco-conseil en 2003. Il a aussi soutenu un de nos étudiants Jean-Philippe Lafontaine-Messier, pour la création de la réserve de la biosphère Manicouagan-Uapistat située au nord de Baie Comeau. Conseiller scientifique émérite à Environnement Canada, Fred Roots était un homme d’action, un esprit universel et un mentor qui nous a guidés avec son enthousiasme et son énergie communicative. Son action auprès du groupe « Students on Ice » auquel il a participé aux expéditions polaires jusqu’à l’hiver dernier en témoignent (https://www.youtube.com/watch?v=_QCv1C6q1RU&feature=youtu.be).

La science se construit à travers la contribution de multiples générations de personnes dédiées à résoudre les mystères de la nature. Nul ne peut s’attribuer le mérite de son évolution, nous avons besoin de géants comme Fred Roots pour voir plus loin. Mais la science ne se fait pas dans un monde débranché de la réalité. Il nous a montré que le progrès des connaissances devait être partagé et mis au service de la communauté. Il demeurera une source d’inspiration pour ceux et celles qui veulent aller au-delà des idées reçues.

En mémoire de Fred Roots

Claude Villeneuve
 Professeur titulaire
 Directeur de la Chaire en éco-conseil, DSF, UQAC
 claude_villeneuve@uqac.ca

Monsieur Roots était un ami qui a signé la préface de la première édition de mon livre Vivre les changements climatiques en 2001 et qui a soutenu la création du programme de DÉSS en éco-conseil en 2000 ainsi que la création de la chaire en 2003.

À l’époque j’étais président de la Commission des sciences naturelles sociales et humaines de la Commission canadienne pour l’UNESCO.

Fred Roots a aussi beaucoup aidé Jean Philippe Lafontaine -Messier diplômé du DÉSS en éco-conseil pour la création de la Réserve de la Biosphère Manicouagan-Uapistat dans laquelle j’ai aussi été impliqué à titre de prof à l’UQAC.

Message sent on behalf of Sébastien Goupil, Secretary-General, Canadian Commission for UNESCO

Dear colleagues,

It is with great sadness that we learned of the passing of CCUNESCO’s long-time friend and supporter, Dr. Fred Roots. Many of you will remember him taking an active part in our AGMs, talking with passion and enthusiasm about biosphere reserves and the connection between nature and humankind.

In 1968, Dr. Roots—Fred, as we used to call him—participated in the UNESCO Man and the Biosphere Programme.  He was also the founder of the Canadian MAB Committee, which he chaired.  He was a devoted and relentless supporter of the MAB Programme in Canada. In a recent correspondence with CCUNESCO, Fred Roots wrote:

We should always keep in mind that the Man and the Biosphere Programme is essentially a scientific exercise and objective, [which] includes the four main scientific activities of UNESCO—atmosphere, water (fresh and oceans), solid land, and biology (including people)—and that UNESCO itself is an institution of Education, Science, and Culture –ESC. Biosphere Reserves are a principal means by which MAB contacts and incorporates the other three scientific domains within both a local and international context, and demonstrates the essential inter-relation of Education, Science, and Culture. Biosphere Reserves are not an easy concept, but they are real; and when they work well, their importance and influence increases year by year.”

In recent years, Fred Roots had been an invaluable advisor, mentor, participant and founding father of the international “Students on Ice” expedition program, sharing his vast knowledge, passion and experience with new generations.

Fred Roots has a mountain chain named after him: Antarcticas “Roots Range.” He was the author of over 250 scientific papers and reports on polar, environmental and global change subjects. He participated in dozens of scientific expeditions in the Arctic, Antarctic, Himalayas and Rockies as a senior geologist. He also holds the record for longest unsupported dogsled journey, for a total of 189 days. He helped author the Antarctic Treaty, which preserves the entire continent as a stateless territory dedicated to scientific research.

Fred Roots was Science Advisor Emeritus to Environment Canada. He graduated in geological engineering at the University of British Columbia, and received his PhD in geology from Princeton University. He has been recognized by the Explorers Club in NYC with their highest award, the Explorers Club Medal, one he shares with some famous explorers: Knud Rasmussen, Roald Amundsen, Neil Armstrong and Jane Goodall.

The Canadian Commission for UNESCO celebrates the contribution of this great Canadian and extends its deepest sympathy to his family and friends.

Tribute Video by Students on Ice:

https://www.youtube.com/watch?v=_QCv1C6q1RU&feature=youtu.be

La nature de la Nature

 Je suis toujours mal à l’aise avec les commentaires qui accompagnent les documentaires sur la nature. Malgré des images époustouflantes et une facture soignée, les auteurs des textes d’accompagnement gâchent la valeur scientifique du produit final. Sous prétexte de vulgarisation, on y raconte le plus souvent n’importe quoi. J’en prends comme exemple l’emploi de formules comme : « Cet animal a évolué pour … » ou encore « Les espèces dans cet écosystème doivent maintenir son équilibre … ». Ces expressions, en apparence anodines, portent un bagage qui n’est pas représentatif de la réalité ni des bases scientifiques de la biologie évolutive.

Cette science nous apprend en fait que l’évolution n’est pas un phénomène déterministe, c’est-à-dire qu’elle n’est pas dirigée vers un but et qu’elle ne procède pas par des étapes prévisibles. Charles Darwin nous a appris il y a plus de 150 ans que le moteur de l’évolution est la sélection naturelle. Cette dernière, souvent résumée par la formule « la survie du plus apte » signifie que lorsque des individus de la même espèce sont confrontés à une condition limitative du milieu, celui qui tirera le mieux son épingle du jeu survivra et pourra passer ses gènes à la génération suivante. Comme je dis à mes étudiants : « Au CÉGEP de la vie, il n’y a que deux cours, Survie 101 et Reproduction 101, et le premier est un prérequis absolu pour faire le second. » Ainsi, comme le remarquait Darwin, et bien avant lui Linné, les plantes et les animaux font beaucoup plus de descendants à chaque génération que le milieu ne peut en accueillir. Seuls les plus aptes, c’est-à-dire les mieux pré-adaptés survivent. Cette préadaptation peut prendre diverses formes. Dans certains cas, c’est le plus fort, le plus intimidant ou au contraire c’est le mieux dissimulé, le plus rusé ou simplement le plus chanceux qui se trouve là où le prédateur ne l’attend pas qui vont survivre.

 Dans les périodes de stabilité, l’évolution est donc conservatrice. Les plantes et les animaux se ressemblent d’une génération à l’autre et l’observateur se dit que « La Nature est bien faite » puisque d’une génération à l’autre, les choses semblent immuables. Il en va de même pour « l’équilibre » des écosystèmes. Puisque les populations d’organismes interagissent les unes avec les autres et avec leur milieu, les écosystèmes changent très lentement dans le temps et se maintiennent autour d’un équilibre dynamique. En revanche, lorsqu’une perturbation d’origine humaine ou naturelle change brutalement les conditions du milieu, c’est une nouvelle donne. Dans le cas d’un incendie ou d’une coupe en forêt boréale par exemple, le milieu ouvert sera recolonisé par les espèces qui sont présentes à proximité ou celles dont les graines ont survécu au désastre. La nouvelle forêt ressemblera à terme à celle qui a été détruite parce que les espèces sont pré-adaptées aux conditions du climat local. Il n’y a pas de plan déterminé, simplement un effet du hasard et de la nécessité comme le résumait le titre du livre paru en 1970 sous la plume de Jacques Monod, prix Nobel de médecine en 1965.

 Ainsi, les plantes et les animaux n’évoluent pas POUR quelque chose. Ils évoluent EN FONCTION des contraintes du milieu. C’est pour cela que des espèces comme l’Agrile du frêne introduites dans de nouveaux milieux deviennent invasives. Elles sont pré-adaptées aux conditions locales et elles réussissent mieux que les espèces indigènes qui ne sont pas pré-adaptées au nouvel arrivant. La biologie évolutive est pleine d’exemples qui démontrent que les espèces ont foisonné et buissonné dans l’histoire de la Terre et la Nature avec laquelle nous vivons aujourd’hui n’est pas meilleure ni moins bonne que celle d’il y a cinq ou dix millions d’années. Elle est différente. C’est tout. La Nature n’a ni éthique, ni projet. La Nature EST, c’est tout. C’est notre regard, nos fantasmes et nos valeurs qui lui prêtent des intentions.

Claude Villeneuve
Professeur titulaire
Directeur de la Chaire en éco-conseil
Département des sciences fondamentales
Université du Québec à Chicoutimi
claude_villeneuve@uqac.ca

Les municipalités et les Premières Nations participeront à des projets conjoints de gestion des matières résiduelles solides

Ottawa, le mardi 4 octobre – La Fédération canadienne des municipalités (FCM) invite les municipalités et les Premières Nations à faire une demande au nouveau Projet de partenariats en infrastructures communautaires (PPIC) pour mettre en oeuvre des projets de gestion des matières résiduelles solides.

CIPP_communiqué_4oct2016

Ni l’un, ni l’autre

Le gouvernement du Canada a annoncé qu’il ne changerait pas sa cible de réduction des gaz à effet de serre (GES) à l’horizon 2030 pour répondre à l’Accord de Paris. Ce recul apparent d’ambition n’est pas anodin. Le développement de l’économie canadienne, axé sur l’extraction de ressources naturelles pour les marchés d’exportation a imprimé une empreinte forte qui se traduit aujourd’hui par une difficulté de changement d’autant plus grande qu’on a beaucoup investi dans ce modèle non soutenable.

Il y a cinquante ans, j’apprenais à l’école que l’amiante était un minéral merveilleux, porteur d’avenir pour de multiples secteurs industriels en raison de ses propriétés ignifuges, isolantes, textiles, etc. On en voyait partout. Le marché semblait illimité. En plus, le Québec disposait des plus grands gisements d’amiante du « monde libre » et il était source de prospérité pour la région d’Asbestos. En 1977, le Gouvernement du Québec a nationalisé une partie de l’industrie pour profiter de l’aubaine. C’était une erreur. À mesure que les effets sur la santé des travailleurs et sur la qualité de l’air intérieur de l’amiante ont été connus, des restrictions de plus en plus fortes se sont mises en place un peu partout dans le monde. Le commerce de l’amiante est devenu plus difficile, donc moins rentable. Aujourd’hui, il y a toujours des réserves d’amiante au Québec, mais si on en trouve dans un édifice, il faudra payer des sommes faramineuses pour s’en débarrasser.

Le pétrole et les autres carburants fossiles ont été au cœur du développement industriel du dernier siècle. À juste titre, posséder des réserves de pétrole était un avantage économique, à condition de pouvoir rejoindre les marchés.  Depuis plus de trente ans, l’enjeu des changements climatiques et la qualité de l’air des villes pèsent sur l’avenir du pétrole comme carburant. Il est scientifiquement établi que nous ne pouvons plus continuer sur la même tendance de consommation toujours accélérée. Pis encore, les scientifiques nous ont clairement démontré que pour la sauvegarde des équilibres planétaires, il fallait que nous devenions rapidement moins dépendants des carburants fossiles, quitte à ce que les réserves actuellement connues restent sous terre, où elles ne posent aucun problème pour l’environnement.

Actuellement, deux projets sont présentés dans le débat public comme des enjeux de développement économique : « Énergie est » pour le transport de brut des sables bitumineux d’Alberta vers l’Atlantique et l’exploration pétrolière à Anticosti pour déterminer d’éventuels paramètres d’exploitation de cette ressource au Québec. Une certaine opposition se manifeste localement en raison des impacts environnementaux présumés en cas de déversement ou pour le tribut que l’exploitation porterait à notre patrimoine naturel. Nous ne discuterons pas du bien fondé de ces arguments. La question est ailleurs. Le pétrole n’est plus une ressource d’avenir et à mesure qu’on diminuera la demande pour ce produit, les ressources connues deviendront largement suffisantes pour les besoins décroissants de l’économie du futur.

Trouver un gisement d’amiante aujourd’hui n’est pas une nouvelle qui fera augmenter la valeur d’une entreprise. Dans trente ans, il en sera possiblement de même avec les gisements de pétrole non conventionnels. La construction du pipeline « Énergie est » créera une pression sur l’exploitation de nouveaux projets en Alberta. L’extraction de pétrole de schiste à Anticosti sera chère et risquée. Les deux contribueront à augmenter les émissions de GES du Canada. Le fardeau sera reporté sur tous les autres secteurs de la société.

Les ressources minérales sont infiniment patientes. La bonne décision est donc de ne faire ni l’un ni l’autre de ces projets. Si l’économie du futur demande une transition énergétique, il faut agir maintenant sous peine de traîner nos passifs encore longtemps.

Claude Villeneuve, Professeur titulaire, Directeur de la Chaire en éco-conseil, Département des sciences fondamentales, Université du Québec à Chicoutimi, claude_villeneuve@uqac.ca, 418-545-5011 #5059

Il faut faire la différence !

Des chroniqueurs de l’ouest canadien considèrent que les réticences du Québec au passage du pipeline « Énergie Est » sur son territoire sont un geste discourtois, voire malintentionné qui menace les emplois et le développement économique en Alberta. On apporte comme argument « Que dirait le Québec si une autre province s’opposait au passage de son électricité ? ». Cet argument démontre une ignorance profonde des règles du commerce de l’énergie au Canada. En effet, si le transport du gaz et du pétrole sont de juridiction fédérale, le transport de l’électricité est régi lui par des règles provinciales. Cela change profondément les règles du jeu et on ne peut pas confondre l’un et l’autre.

Le transport des hydrocarbures est soumis à l’approbation de l’Office national de l’énergie, un organisme fédéral, alors que la construction d’une ligne à haute tension est soumise à l’approbation de la Régie de l’énergie du Québec et au processus du Bureau d’audiences publiques sur l’environnement (BAPE). On a d’ailleurs vu que le promoteur du pipeline a fait preuve de beaucoup de réticences pour comparaître devant le BAPE et que le Gouvernement du Québec a dû faire des entourloupettes pour donner l’impression qu’il avait un pouvoir quelconque sur l’autorisation de ce projet. En revanche, si le Québec voulait hypothétiquement traverser le Canada pour vendre ses surplus d’électricité dans une autre province (en supposant que les lignes existent), il pourrait le faire en payant pour chaque kilowattheure transporté un tarif équivalent à celui que les producteurs locaux doivent payer. Cet arrangement fonctionne aussi avec les Etats-Unis depuis 1995, lorsque les Etats-Unis ont obligé de scinder Hydro-Québec en HQ-Production, H-Q Transport et HQ-Distribution pour isoler les composantes du prix de l’électricité, permettant ainsi la réciprocité. Si un producteur américain réussit à établir un contrat de gros avec HQ Distribution, le prix du transport de l’électricité au kilomètre sera le même que pour un producteur québécois qui voudrait vendre à un distributeur américain. C’est un principe qu’on appelle le « wholesale wheeling », une dérèglementation du marché du gros. Cela a été établi dans les années 1990 suite à des expérimentations faites dans différents états américains pour réduire les coûts de l’électricité en brisant les monopoles.

La situation serait différente si un producteur d’électricité voulait traverser une province voisine avec une ligne électrique pour en desservir une troisième. Ce cas de figure se présenterait si, par exemple, on voulait traverser le Québec avec une ligne pour approvisionner le marché ontarien avec une nouvelle centrale comme Lower Churchill située au Labrador sans payer de redevances. C’est exactement l’analogie avec le transport des hydrocarbures. Le pipeline est propriété d’une entreprise privée, qui charge au producteur un tarif pour chaque baril transporté. Il n’y a aucune redevance pour le baril transporté qui revienne aux provinces et municipalités où passe le pipeline. Pourtant, elles doivent gérer les risques environnementaux et sociaux qui sont liés, non seulement à l’infrastructure, mais aussi aux produits transportés.

Le transport d’électricité et le transport de pétrole ne sont donc pas assimilables, ni en termes de règlementations, de risques et de nuisances environnementales. Leur contribution à l’économie des territoires traversés non plus. C’est particulièrement important dans un contexte où, en plus, l’impact du pipeline sur les projets d’extraction du pétrole des sables bitumineux en Alberta fera augmenter fortement les émissions de gaz à effet de serre, ce qui imposera des efforts de réduction supplémentaires pour tout le monde si on veut atteindre les cibles de l’Accord de Paris pour la lutte aux changements climatiques. Non seulement le Québec ne recevra rien, mais il devra s’imposer des coûts supplémentaires. N’est-ce pas normal d’y penser à deux fois ?

Claude Villeneuve, Professeur titulaire, Directeur de la Chaire en éco-conseil, Département des sciences fondamentales, Université du Québec à Chicoutimi, claude_villeneuve@uqac.ca, 418-545-5011 #5059

1ECC825- Intervention en éco-conseil

L’objectif général du cours est de familiariser les étudiants aux approches méthodologiques et d’intervention de l’éco-conseil, appliquées aux problématiques socio-écologiques. Le cours propose une approche originale de co-enseignement où plusieurs chargés de cours mettent en synergies leurs différentes compétences afin d’aborder ces problématiques dans le paradigme de la pensée complexe.

L’approche pédagogique d’apprentissage par problèmes est organisée de manière à diversifier les stratégies pédagogiques : co-construction des apprentissages, la pédagogie participative, récits de pratique, l’apprentissage par les pairs.

Plusieurs liens seront faits  avec la pratique à travers différentes thématiques et méthodologies d’intervention : pensée cycle de vie, analyse de développement durable, évaluation multicritère, processus participatifs et de dialogue, analyse des catégories de discours, transition, etc. L’objectif est donc une initiation à la pratique réflexive.

http://cours.uqac.ca/1ECC825

Pour information, n’hésitez pas à communiquer avec :

Karen Blackburn
Secrétaire de module ou programme d’études avancées
Département des sciences fondamentales
Local P4-2320
Université du Québec à Chicoutimi
555, boul. de l’Université
Chicoutimi (Québec) G7H 2B1