Hommage à Claude Villeneuve, professeur titulaire et fondateur de la Chaire en éco-conseil (1954-2024)

Claude Villeneuve est décédé subitement le 19 mai 2024, quelques mois seulement avoir pris sa retraite de l’enseignement à l’Université du Québec à Chicoutimi en septembre 2023. Il demeurait cependant co-directeur de la Chaire en éco-conseil et de l’infrastructure de recherche Carbone boréal ainsi que professeur associé au Département des sciences fondamentales.

Membre du Cercle d’excellence de l’Université du Québec depuis 2006, en 2018, il a reçu le prix d’excellence de l’Université du Québec en enseignement volet leadership. Le professeur Villeneuve a marqué de manière indélébile le domaine de l’environnement et du développement durable, tant au niveau local qu’international. Dès son arrivée en tant que professeur invité à l’UQAC en 2001, sa renommée était déjà bien établie, comme en témoigne son titre de « Scientifique de l’année 2001 » décerné par Radio-Canada. En 2022, il a reçu le prestigieux prix Pierre-Dansereau qui souligne l’excellence et le rayonnement de travaux de recherche scientifique contribuant à améliorer la qualité de la vie en société.

Les contributions du professeur Villeneuve sont multiples et diversifiées : ses travaux, collaboratifs et transdisciplinaires, anticipaient souvent de plusieurs années les programmes et pratiques adoptés par les gouvernements et organisations internationales. Dans ses derniers mois, il était particulièrement fier que la Chaire ait réalisé la première empreinte carbone d’une élection générale provinciale en Amérique du Nord. Il prônait une approche pragmatique, appelant à la responsabilité individuelle et collective. Ses initiatives étaient conçues pour s’inscrire dans la durée et étaient reconnues pour leur grande rigueur scientifique.

Un legs à la société québécoise
Claude Villeneuve a donné à la société québécoise un nouveau métier : l’éco-conseiller. Il a fait de l’UQAC le lieu de formation à ce métier, en créant d’abord le Diplôme d’études supérieures spécialisées (DESS) en éco-conseil dès 2001, puis une carte de programmes de perfectionnement dans ce domaine. Il a su attirer et former des praticiens du développement durable de toutes disciplines et origines géographiques grâce à des programmes de perfectionnement innovants.

Chaire en éco-conseil
Sa vision a permis la création de la Chaire en éco-conseil en 2003, une structure de recherche qui a généré des financements significatifs et assuré une formation de haut niveau aux étudiants et étudiantes. Les travaux de la Chaire ont conduit à des avancées majeures, comme l’élaboration de la méthodologie pour le calcul des réductions de gaz à effet de serre. C’est à partir de cette préoccupation que la Chaire a participé à l’élaboration de la norme ISO 14064 publiée en 2006. L’équipe du professeur Villeneuve a développé une approche permettant d’évaluer les réductions des gaz à effet de serre suite à l’organisation d’événements, tels des congrès par exemple, en compensant les émissions selon les principes du développement durable et cela avant la publication de la norme ISO 14067 sur l’empreinte carbone.

Une de ses réalisations les plus tangibles en cette matière est le développement d’une grille d’analyse en développement durable (GADD) selon six dimensions, qui évolue depuis 1991. Le but de cette grille est de partager les connaissances et faciliter l’intégration des valeurs de développement durable dans les entreprises, les gouvernements et institutions. Le professeur Villeneuve a rendu la grille et son guide d’utilisation disponibles gratuitement, à partir du site de la Chaire. Cet outil permet d’évaluer comment se classe un projet, une politique, un plan d’action (etc.) selon les dimensions du DD et couvre l’ensemble des objectifs et des cibles de mise en œuvre du développement durable du Programme des Nations-Unies Agenda 2030.

Carbone boréal
C’est à l’initiative du professeur Villeneuve, basé sur les études de la forêt boréale des chercheurs de l’UQAC (Réjean-Gagnon et Daniel Lord), qu’est né en 2008 le concept novateur de Carbone boréal. Carbone boréal est à la fois un programme de compensation de gaz à effet de serre par la plantation d’arbres et un projet de recherche mené par des chercheurs de I’UQAC. Ce projet vise à construire, par des plantations destinées à la recherche, un laboratoire naturel pour tester à long terme des hypothèses concernant notamment le rôle de l’afforestation de landes forestières dans une perspective de lutte et d’adaptation aux changements climatiques. Ainsi, les personnes désirant compenser des émissions de gaz à effet de serre « sociofinancent » également la recherche universitaire. En mai 2024, Carbone boréal avait planté tout près de 2 millions d’arbres et ainsi assuré le retrait de l’atmosphère de 161 800 tonnes de CO2 équivalent, générant ainsi plus de 3 millions de dollars de revenus pour soutenir la recherche. Les plantations et les travaux de recherche de Carbone boréal se poursuivent, tel qu’il le souhaitait, ajoutant à ce bilan fort appréciable.

Un grand vulgarisateur scientifique
Vulgarisateur scientifique infatigable, Claude Villeneuve a été un pédagogue pour le grand public, rédigeant plusieurs ouvrages et articles sur le développement durable et les changements climatiques et participant activement à des émissions de radio et télévision. C’était de plus un conférencier très apprécié, passionné et engagé qui rendait la science du développement durable et des changements climatiques accessible et compréhensible par tous. Sa contribution à l’avancement du développement durable au sein de la Francophonie est également inestimable, notamment à travers ses publications sur la gouvernance du développement durable et son engagement lors de congrès internationaux. Il a toujours bien volontiers partagé ses connaissances et son expertise avec les pays moins avancés sur le plan du développement durable.

Claude Villeneuve laisse derrière lui un héritage considérable, une vision audacieuse du développement durable et une conviction profonde que l’éducation est la clé d’un changement positif et durable. Ses réalisations continueront d’inspirer et de guider les futures générations de scientifiques et de praticiens du développement durable. Grâce à sa compréhension des besoins du monde futur et sa volonté de voir se poursuivre son œuvre il a su mettre en place une équipe solide et expérimentée qui maintenant a pris le relais et tente de faire honneur à sa mémoire.